NEOPHOBIE ALIMENTAIRE : RETROUVER LE PLAISIR

Alimentation

Mon expérience clinique auprès des enfants avec des difficultés alimentaires ou des troubles de l’alimentation, m’a permis de me questionner sur le plaisir alimentaire et la place qu’il va prendre dans l’accompagnement des enfants ayant des difficultés alimentaires.

Comment se sont t’il construit émotionnellement autour du repas ? Que peuvent t-il ressentir face au lait qu’on leur propose, à la cuillère, aux morceaux, à la chaise haute, à la table…

C’est quoi un repas ?

Le repas est une occupation de la vie humaine nécessaire à notre survie. Pour les tout petits, on va parler de co-occupation. Quand on devient maman, nos occupations sont chamboulées. Bébé et maman découvrent de nouvelles occupations comme : nourrir bébé et se nourrir. Les repas sont fréquents au cours de la journée (12,10, 8, 6 ou alors 4 fois pour les plus grands). Il est composé de nourriture, diverse et variée qui est adaptée à l’âge mais surtout au capacité sensori-motrice de notre bébé.

On le considère comme un acte naturel car il répond à des besoins physiologiques et il se base sur des réflexes à la naissance. Les réflexes archaïques, succion, fouissement, points cardinaux…, vont permettre au bébé de s’orienter vers le sein tout seul pour aller se nourrir. D’un point de vue sociologique et anthropologique, il permet de produire et d’entretenir le lien social. L’alimentation de notre bébé est un moment social, câlin. Plus tard, il sera un moment de partage de notre journée, Il nous permet de tisser des liens professionnels dans le travail, on fête des événements en famille en se réunissant autour d’une jolie table pour un bon repas.

Le repas est également marqué par la culture de la famille mais aussi le pays d’origine. La religion a également une incidence sur les mets que nous allons partager lors des repas.
 

Le repas plaisir

Dans notre pays, la faim est essentiellement hédonique c’est à dire, poussée par le plaisir. On se nourrit pas seulement par nécessité. La faim hédonique, c’est la faim qui se déclenche quand on passe devant une belle boulangerie avec la bonne odeur de pain chaud. Notre cerveau n’a pas donner le signal qu’il faut manger, mais le cerveau émotionnel réagit au stimulation sensorielle.

L’imagerie cérébrale a permis de mettre en évidence scientifiquement, que lorsque nous mangeons, nous activons au niveau du cerveau des zones du plaisir, qui sont en lien avec le système de récompense. Cette faim est déclencher par nos sens (la vision, l’odeur, le gout) et non pas par une réponse physiologique à la baisse de sucre dans le sang.

Ce plaisir de reproduire une sensation qui nous est agréable, est aussi dictée par la représentation mentale. Depuis notre naissance nous vivons des émotions au moment des repas. Les émotions positives ou négatives vont nous permettre de construire une carte sensorielle alimentaire. La sensation de bien être quand on boit au sein ou au biberon sera alors ancrée dans notre système lymbique.

Nos découvertes autour de la purée ou des morceaux, avec tous nos sens vont permettre d’intégrer les valeurs sensorielles des aliments en association avec des souvenirs agréables. Cette représentation sensorielle alimentaire se construit dès la naissance par rapport aux expériences alimentaires que nous avons vécu.

La valeur hédonique d’un aliment “aimer” va favoriser la motivation pour le manger. On va opposer à la faim hédonique, la faim homéostatique, sensation qui est liée au niveau de sucre qui va descendre dans le sang. Le cerveau va répondre au signal en déclenchant le besoin de manger.

 

En résumé

La palatabilité, le plaisir de manger certains aliments et donc dépendant de la caractéristique sensorielle et la représentation mentale de cet aliment. On sait d’après les études que les bébés ont un attrait naturel vers le sucré et le goût unami (une molécule que l’on va retrouver dans le lait maternelle). Le goût sucré entraine de façon universelle une addiction. Il est également une réponse au circuit de la récompense.

 

Mon bébé hurle dès qu’il voit qu’il va manger

Pour certains bébés, avec des troubles organiques comme des RGO, des allergies, des freins de langue restrictifs, s’alimenter est un combat. Il doivent lutter et fournir un effort considérable pour arriver à extraire du lait.

Et parfois quand il y a des douleurs, s’alimenter est associer à une mauvaise émotion. Le bébé tout petit soit il, va donc mettre en place des compensations comportementales pour éviter le moment du repas. On peut avoir des bébés qui s’endorment très rapidement quand il mange, qui s’agitent quand il voit le sein ou le biberon, qui prennent quelques minutes et qui repoussent la nourriture…Ce n’est pas un problème psychologique du bébé mais plutôt un lien de cause à effet. Manger cela me fait mal, je ne veux plus manger.

Vous mangez des huitres, vous êtes malade pendant deux jours derrière, même si vous aimez le gout des huitres vous allez arrêter d’en manger. Ce n’est pas non plus le stress de la maman qui occasionne un refus alimentaire du bebe. C’est le stress, qui est secondaire et se met en place progressivement parce que le bébé ne peut pas se nourrir correctement. Soit en dit en passant, qui ne serait pas angoisser quand un bébé n’arrive pas à s’alimenter?

Que faire quand il y a des difficultés émotionnelles au moment de la prise alimentaire ?

A mon sens, on ne peut augmenter les quantités et développer le panel alimentaire si le bébé ou le jeune enfant n’est pas dans une occupation qui lui apporte du plaisir. Assez souvent les parents recherchent à augmenter les quantités mais aussi à retrouver une alimentation sereine pour leur tout petit. Quand j’accompagne les parents, ma première priorité n’est pas organique ou sensori motrice mais de rétablir un plaisir sur la prise alimentaire., afin de rétablir une prise alimentaire sereine mais aussi à découvrir sensoriellement les aliments. Mon premier but n’est pas que le bébé ou l’enfant mange mais qu’il prenne du plaisir…

On va donc amener plusieurs changement notamment dans l’environnement de l’enfant. Les fonctions organiques et sensori motrice sont parfois plus longue à faire évoluer.

On peut changer les lieux, les outils, le timing, la fréquence, les aliments. Parfois des petites choses amènent certains changements significatifs. Pour les plus grands qui ont des difficultés alimentaires, avec un panel alimentaire restreint, on va proposer des aliments qu’il aime à chaque repas. C’est ce que j’appelle le goût copain, son rôle sera d’établir le plaisir alimentaire. On va leur proposer d’explorer et non de goûter. On ne demande pas à un bébé de 6 mois de marcher mais d’explorer son environnement au niveau moteur avant de pouvoir marcher…

Pour apprécier la nourriture, il est nécessaire d’accepter de la regarder, de la découvrir avec les doigts, d’accepter de l’approcher de ses lèvres pour la sentir et de pouvoir la mettre en bouche pour en explorer son goût et sa texture.

Arrêtons de demander à nos enfants de gouter, mais emmenons leur attention sur une toute autre découverte, l’utilisation de tous leur sens pour manger.

Petit a petit, les repas vont devenir à nouveau serein et convivial.

Marie RUFFIER BOURDET 

LA MOTIVATION POUR GOUTER QUAND ON A UN TROUBLE DE L’ALIMENTATION
LECTURE JEUNES PARENTS: Soyez l’expert de votre bébé

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